En direct de la loi – Avertisseurs de radars : leurs alertes neutralisées ?


En 2011, le gouvernement voulait les interdire. Dix ans plus tard, les avertisseurs de contrôles de vitesse restent légaux, et les inhibitions de certaines alertes, prévues par la LOM, ne sont toujours pas effectives… Elles pourraient l'être à compter du 1er novembre 2021. Notre rubrique En direct de la loi répond à vos questions et vous permet de mieux comprendre vos droits, grâce aux conseils et recommandations notamment de Maître Caroline Tichit.


Depuis longtemps, les pouvoirs publics lorgnent sur les assistants d'aide à la conduite, le nom officiel des avertisseurs de radars de type Coyote et Waze. Après avoir voulu les interdire, ils cherchent à les neutraliser en certaines circonstances. Où en est-on exactement aujourd'hui ? Voici ce qu'il faut retenir, avec les précisions de l'avocate Caroline Tichit…

dailymotionEn direct de la loi – Avertisseurs de radars : leurs alertes neutralisées ?

En direct de la loi – Avertisseurs de radars : leurs alertes neutralisées ?

Un décret précisant les modalités d'application de l'article L130-11 du code de la route qui prévoit d'interdire la retransmission des messages d'alerte de ce type d'appareils (ou applications), comme prévu par la Loi d'Orientation des Mobilités (LOM), vient de paraître. Il fixe une partie des modalités nécessaires à cette mise en œuvre… L'interdiction sera ainsi prise par le préfet sur proposition de la police ou de la gendarmerie, et les informations indiquant "les voies ou portions de voies concernées et (...) la date et les heures de commencement et de fin de cette interdiction" seront "communiquées (...) au moyen d'un système d'information permettant de garantir leur confidentialité et leur intégrité lors de la transmission."

Mais attention, les "modalités techniques d'échanges" avec les exploitants de ces services "ainsi que les moyens à mettre en place pour en assurer la protection et la destruction après utilisation" doivent encore être "définis par arrêté du ministre de l'intérieur pris après avis de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information", stipule également le décret paru au JO de ce 20 avril… En clair, ce n'est pas prêt. D'ailleurs, il est prévu que le décret entre "en vigueur le 1er novembre 2021" seulement.

Dix ans que ça dure…

C'est en 2011 que les assauts ont commencé. À l’époque, le gouvernement avait carrément émis le vœu d'interdire ces avertisseurs de radars. Mais l'affaire s'était soldée par un simple changement de vocabulaire : le mot "radar" était banni de toutes les alertes, et les dispositifs étaient rebaptisés en "assistants d'aide à la conduite". Pour finir, surtout, ça donnait l'impression d'un véritable coup de pub pour ces derniers !

Avec la LOM, promulguée à la toute fin décembre 2019, la brèche paraît cette fois bien ouverte, mais la flèche est loin de taper dans le mille. Si le texte donne en effet "un cadre pour permettre la neutralisation des services de ces assistants d'aide à la conduite, afin d'éviter que ces différents services ne puissent avertir les conducteurs de l'existence de contrôles", indique Me Tichit, il ne cible absolument pas les contrôles de vitesse. "On imaginait que cette neutralisation vise surtout à éviter de prévenir la présence de radars, or la loi ne les concerne pas du tout".

Pour l'heure, l'article L130-11 du code de la Route, relatif à cette nouvelle mesure, pointe uniquement les contrôles routiers de dépistage d'alcoolémie, de stupéfiants, les contrôles de vérification effectués dans le cadre de poursuite d'actes de terrorisme, de personnes recherchées, de vol, de recel, de trafic de stupéfiants, d'armes, d'explosifs, pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, pour des crimes ou délits punis d'au moins trois ans d'emprisonnement. Exit les contrôles radars. Du moins, pour l'instant…

"La durée de cette interdiction ne peut excéder deux heures" pour les contrôles d'alcoolémie ou de stupéfiants, "ou douze heures s'il concerne une autre opération", dixit encore l'article. "Les voies ou portions de voies concernées ne peuvent s'étendre au-delà d'un rayon de dix kilomètres autour du point de contrôle routier lorsque celui-ci est situé hors agglomération et au-delà de deux kilomètres (…) en agglomération", détaille-t-il également.

Une neutralisation pas encore effective

Une telle loi était-elle bien nécessaire pour ce genre de contrôles ? On peut s'interroger puisque par le passé, en des circonstances certes exceptionnelles, il est déjà arrivé que Coyote suspende par exemple son service. C'est ce que l'entreprise nous a indiqué pour ce qui est des "attentats terroristes (janvier et novembre 2015)", et ce, "afin d'avoir la certitude qu'aucune de ses alertes ne puisse être détournée au profit d'un ou plusieurs individus dangereux qui souhaiteraient déjouer les contrôles de police". Coyote n'a donc "aucun état d'âme" pour ces "cas d’inhibitions ponctuelles prévus par le décret (les contrôles anti criminalité, et les tests d'alcoolémie et de drogues), pour une période définie et dans une zone donnée".

Mais en l'état, toute la réglementation nécessaire n'est de toute façon pas encore au point pour permettre de telles inhibitions. Et une fois que cela le sera - peut-être d'ici la fin 2021, compte tenu de la date d'entrée en vigueur du décret -, il restera à vérifier que le procédé soit vraiment utilisé. Et ça, ce n'est pas gagné !